Expérimenter la physiothérapie au Moyen-Orient

Au cours de ma dernière année à la maîtrise en physiothérapie, j’ai eu la chance et l’honneur de représenter le programme de physiothérapie de l’Université Laval à Doha, au Qatar, Moyen-Orient. Je travaillais à Aspetar, un hôpital privé spécialisé en orthopédie et médecine sportive. Voici quelques lignes sur mon expérience de trois mois dans un hôpital orthopédique de pointe.

experimenter

Le processus

Comme plusieurs de mes collègues, j’ai eu la chance de visiter de réaliser un stage à l’international, après avoir  démontré mon intérêt aux personnes chargées des stages d’intégration en milieu interculturel de deuxième cycle. Après une courte attente pour étudier mon dossier, j’ai reçu la très bonne nouvelle que je partais, quelques mois plus tard, pour le Moyen-Orient !

 

Quitter le Québec pour un pays dont je ne savais à peu près rien sauf concernant leur candidature pour la Coupe du Monde de soccer 2022 n’aurait pas été mon audacieux. C’est pourquoi j’ai commencé à lire sur ce pays une dizaine de mois avant mon départ.

Il était de mon devoir de lire – entre autres – sur le pays, la culture, la religion, mais aussi sur Aspetar, les soins de santé offerts là-bas et les sports les plus pratiqués. Comme ce stage en était un d’intégration en milieu interculturel, j’allais devoir réaliser un projet qui aiderait d’un point de vue physiothérapeutique la population qatarie, et plus précisément, la population d’Aspetar.

Mon arrivée

Après plusieurs vols, j’étais rendu à l’aéroport international de Doha. À mon arrivée, le responsable des physiothérapeutes, Michael Saretsky, m’attendait à l’aéroport afin de me conduire à mes appartements. M. Saretsky est originaire de la Saskatchewan, alors je ne crois pas que j’aurais pu être mieux accueilli afin de réduire le clash à l’arrivée.

Lits de physiothérapie à Aspetar

Après avoir fait rapidement connaissance avec ce clinicien d’expérience, il me laissa à mon nouveau chez moi en soirée afin de me reposer un peu. Il allait être de retour le lendemain matin afin de me faire visiter la ville et faire ma première épicerie. Cela m’apporte à parler du coût de la vie qui est légèrement supérieur à celui du Canada ; les fruits et légumes sont légèrement plus chers, les vêtements sont au même prix qu’ici, mais ce qui est le plus frappant est le prix des loyers qui sont très, très coûteux ! Évidemment, le prix de l’essence est ridiculement bas lorsqu’on le compare au prix d’ici!.

Hôpital Aspetar

Les différences physiothérapeutiques

D’emblée, je dois dire que les universités qataries n’offrent pas encore de programme de réadaptation à leur étudiant. Ainsi, tous les physiothérapeutes rencontrés lors de mon séjour à Aspetar provenaient de l’extérieur du pays. Tunisiens, français, allemands, australiens, américains, néerlandais, africains du sud travaillent ensemble afin de rejoindre les plus hauts standards internationaux possibles dans le traitement des blessures musculo-squelettiques! Du moins, c’est la mission du département, mission qui a été décrite suite à un workshop réalisé pendant mon séjour. J’ai adoré cette expérience et je la propose à toute entreprise!

Entraînement à Aspetar

La différence la plus importante au niveau de la physiothérapie concerne les ressources financières et humaines qui profitent à Aspetar. Lorsqu’un athlète arrive en réadaptation, il est fort probable qu’il arrive avec le bilan du médecin sportif et avec les rapports de radiographie et d’imagerie par résonance magnétique ! Évidemment, le challenge est différent puisque vous savez comme moi que l’imagerie ne nous dit pas tout. Ainsi, nous avons toujours autant d’éducation à faire aux patients et notre but est toujours de voir comment affecte la blessure du joueur au quotidien et que devons-nous faire pour rétablir sa condition.

Toujours concernant les ressources, l’hôpital privé abrite sous un même toit tous les professionnels de la santé que peut avoir besoin un athlète : médecin du sport, chirurgien orthopédique, psychologue sportif, nutritionniste, podiatre, physiothérapeute, infirmière, dentiste, thérapeute athlétique, kinésiologue, massothérapeute, etc. De cette façon, mon rôle comme physiothérapeute se limite exclusivement au rétablissement de la pathologie en soi ; le kinésiologue entraîne l’athlète pendant sa blessure (pour éviter de prendre du poids, en équipe avec le nutritionniste) et le thérapeute athlétique l’entraîne sur le terrain pour le retour au sport.

Piste de gymnase à Aspetar

Un aussi grand bassin d’athlètes sous le même toit permet aussi de créer des groupes de réadaptation. Entre autres, les athlètes opérés pour une reconstruction du ligament croisé antérieur (LCA) profitent de groupe afin de mener à bien leur réadaptation. Ainsi, 3 fois par semaine, ces athlètes se déplacent à Aspetar pour faire leur exercice en groupe dans le gymnase de l’hôpital sous la supervision de quelques physiothérapeutes.

Finalement, puisque le bassin d’athlète est important, des séances d’aquathérapie sont aussi offertes et supervisées par quelques physiothérapeutes. Plusieurs aspects de la condition du sportif y sont traités et des vélos et des tapis roulants avec jet d’eau sont disponibles.

Les différences culturelles

Évidemment, l’expérience culturelle que m’a apportée ce stage est exceptionnelle. J’ai été plus d’une fois confrontée par la réalité qatarie, mais j’ai toujours cherché à comprendre pourquoi les choses fonctionnaient de cette façon là-bas, et je crois que c’est tout à mon honneur d’avoir éviter le jugement.

Tout d’abord, il est nécessaire de préciser que la religion islamique est omniprésente dans ce pays où l’on parle majoritairement l’arabe du Golfe. Les prières quotidiennes, au nombre de cinq, sont vécues et réalisées différemment par tous. L’éducation est gratuite et obligatoire pour les enfants et les soins de santé y sont gratuits.

Équipe Aspetar

Au niveau d’Aspetar, ce qui a été le plus difficile avec les patients, au-delà de la barrière linguistique, est la finalité que les athlètes blessés réservent à leur réadaptation. Ainsi, peu importe ce que l’on fait pour eux, peu importe ce qu’ils feront en terme d’exercices pour eux-mêmes, c’est la volonté de Dieu qui décidera s’ils guériront ou non ; Inch Allah ! D’ailleurs, les exercices à domicile n’ont pas la cote dans ce pays ; les patients sont prêts à venir cinq fois par semaine pour faire leur exercice en salle, mais ne feront rien à la maison !

Retour possible

En terminant mon stage, j’ai reçu plusieurs bons mots de la part du département de réadaptation et la porte était ouverte pour un éventuel retour à la fin de mes études. Aspetar est un centre hospitalier innovateur aux ressources humaines et matérielles très riches où j’aurais beaucoup à apprendre.

Je n’ai jamais fermé la porte à une autre expérience qatarie, cette fois-ci comme physiothérapeute diplômé, mais je me sens un peu trop bien là où je suis présentement pour penser quitter le sol québécois.

D’ailleurs, ma prochaine chronique portera sur le processus d’embauche en physiothérapie, basé sur mon expérience personnelle.

À bientôt !

 

Pratique