Arthroscopie pour déchirure méniscale

Déchirure méniscale : le placebo aussi efficace que la chirurgie

Selon une étude finlandaise, le traitement chirurgical d’une déchirure méniscale – la chirurgie orthopédique la plus courante – aboutit au même résultat qu’une fausse chirurgie. Des milliers de patients subiraient alors des opérations complétement inutiles.

Ces conclusions, qui ont été publiées dans l’édition de décembre 2013 du New England Journal of Medicine, se penchent sur la pertinence des méniscectomies partielles sous arthroscopie dans la prise en charge chirurgicale des déchirures méniscales. Ce type d’intervention est très populaire et vise essentiellement un soulagement des douleurs.  Aux États-Unis, ce sont plus de 700 000 interventions du genre qui ont lieu sur une base annuelle, pour un coût cumulatif d’environ 4 milliards de dollars.

Selon une autre étude récente, la physiothérapie à elle seule s’est avérée être tout aussi efficace que la méniscectomie partielle sous arthroscopie chez des patients atteints de déchirure méniscale et d’arthrose du genou. Ces conclusions ont poussé des chercheurs finlandais à mener des essais cliniques afin d’observer l’évolution des malades souffrant uniquement méniscale.

Les personnes ayant participé aux essais étaient des personnes âgées de 35 à 65 ans, souffrant de douleurs au genou depuis plus de 3 mois, ne répondant pas au traitement conventionnel et chez lesquelles on a cliniquement diagnostiqué une déchirure méniscale interne. L’étude s’est déroulée dans 5 cliniques orthopédiques en Finlande entre décembre 2007 et janvier 2013.

Les 146 patients concernés ont été assignés, de manière aléatoire, à l’un de deux groupes : un premier groupe de 70 patients qui devaient subir une méniscectomie partielle sous arthroscopie et un deuxième groupe de 76 patients qui allaient subir une fausse opération. Ce genre d’intervention est plus communément nommé Sham Surgery. Les caractéristiques de base comme l’âge, le sexe et le poids étaient similaires entre les deux groupes.

Tous les participants à l’étude ont eu une IRM préopératoire et subi un examen arthroscopique par un chirurgien orthopédiste. Si le patient appartenait au groupe de la méniscectomie partielle, le chirurgien réséquait les parties lésées du ménisque en utilisant les différents outils de l’arthroscopie.

Chez les patients du groupe placebo, le chirurgien simulait l’opération en manipulant le genou, en demandant les outils nécessaires et en faisant intervenir le mêmes mécanismes.

Après la procédure, les patients ont tous bénéficié de la même aide à la marche et ont dû suivre le même programme progressif d’exercices. Ils ont répondu à des questionnaires avant la procédure, 2 mois après, 6 mois après et un an après. L’évolution a été évaluée à l’aide du score de Lysholm, du Western Ontario Meniscal Evaluation Tool (WOMET) et sur la base des douleurs ressenties au genou après l’exercice.

Au bout de 12 mois de suivi, les chercheurs ont constaté une amélioration notable des résultats des 3 outils d’évaluation dans les deux groupes. Mais il n’y avait aucune différence statistiquement significative des résultats entre les deux groupes.

Les auteurs de l’étude concluent, dans la publication :  « Les résultats de ces essais contrôlés montrent que la méniscectomie partielle sous arthroscopie n’apporte aucun avantage notable par rapport à la fausse procédure chez les patients atteints de déchirure méniscale dégénérative et ne souffrant pas d’arthrose du genou.  Ces résultats vont à l’encontre de la pratique actuelle qui consiste à effectuer une méniscectomie partielle sous arthroscopie chez les patients ayant une lésion méniscale dégénérative ».

Les auteurs indiquent cependant que leur étude avait plusieurs limitations. Comme ils n’ont pas inclus les patients dont les symptômes sont liés à des traumatismes, les résultats ne peuvent s’appliquer que sur les personnes atteintes de déchirure méniscale dégénérative interne non traumatique. Ils recommandent notamment d’effectuer un suivi ultérieur afin de déterminer si l’arthrose progresse plus rapidement chez les sujets ayant subi une méniscectomie partielle sous arthroscopie.

Selon Dr. David Felson, professeur de médecine et d’épidémiologie à l’Université de Boston, les conclusions de cette étude viennent démontrer que cette procédure chirurgicale, bien que populaire, ne semble pas être utiles à la guérison du patient.

«C’est une étude de qualité» affirme Dr. David Jevsevar, en entrevue avec TodayInPt,  siégant à la tête d’un comité évaluant la qualité et la valeur de la médecine fondée sur les données probantes à l’American Academy of Orthopaedic Surgeons. «Elle donne une crédibilité additionnelle à un nombre importante d’études qui ont démontré que l’administration d’une  arthroscopie n’est pas toujours pertinente.» Dr. Jevsevar, qui pratique la chirurgie orthopédique au Utah, affirme espérer que ces conclusions pourront permettre aux cliniciens de mieux sélectionner les patients éligibles à la chirurgie.

Cette nouvelle étude vient donc confirmer les constats émis par une étude phare ayant eu lieu au Texas, qui confirmait que les patients subissant une arthroscopie dans les cas d’ostéoarthrite du genou ne présentaient pas de meilleur pronostic que ceux subissant une chirurgie placebo.

En 2008, nos collègues de l’Ontario ont pu démontrer que pour les cas d’arthrite du genou, la chirurgie n’était pas plus efficace que la physiothérapie combinée à la médication. Depuis, plusieurs orthopédistes ont cessé d’opérer les cas simples d’arthrite du genou.

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